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EXTRAIT
Au
temps de la Lypsir - Tome 2 - Trahisons,
roman fantastique, Tom Rock, Fondation littéraire
Fleur de Lys
CHAPITRE 1 - LE CALME AVANT LA TEMPÊTE (Extrait)
Par une journée si ensoleillée et tant remplie d’innocence, un jeune garçon
se dirigeait tout près du lac situé à moins d’un kilomètre à l’arrière du
village avec un seau en métal dans les mains. Il était vêtu d’un simple
habit de paysan en étoffe de laine brune et ceint d’un cordon.
Il regarda quelques instants le paysage dessiné au loin. Il fut alors apaisé
par la beauté de ce dernier. Une rivière séparait en deux une colline
laissant une immense forêt garnir un des deux côtés et un champ de fleurs
envelopper le second. Ce lit d’eau se terminait abruptement par une chute
tombant dans le néant. Derrière cette cascatelle, de majestueuses montagnes
semblaient recouvrir le reste du continent. Leur cime se cachait le bout du
nez dans les minces nuages du ciel bleu.
Le jeune garçon arriva alors au petit lac et y plongea son seau. Le calme
ressenti qui cajolait le cœur du petit enfant se faisait dorloter doucement
par tout être et non-être : les arbres, les fleurs, l’eau, le vent, la
végétation, les petits insectes et les oiseaux par leur chant mélodieux. Le
jeune homme en profita et accompagna ce moment gracieux par une grande
inspiration afin de permettre à ses petits poumons de bénéficier de cette
réjouissance réconfortante. Il détourna ensuite ses yeux sur l’eau qui
pénétrait à l’intérieur du récipient peu à peu. Lorsque ce dernier fut
rempli à la satisfaction du garçon, il retourna vers sa demeure, située sur
une colline recluse derrière le village, afin de le rapporter à son père qui
nettoyait les sabots de son étalon tout près de l’enclos.
Celui-ci, d’imposante posture, était penché vers l’avant, la patte arrière
gauche de son cheval dans ses mains. Lorsqu’il entendit des bruits de pas
provenant de son arrière, il se retourna, remarquant son jeune fils avec un
sourire aux lèvres de son devoir accompli s’approchant de lui, un lourd seau
rempli d’eau fraîche. Le père, de ses yeux bleus, observa le jeune enfant
arriver.
Cependant, sa joie se transforma vite en frayeur lorsqu’il vit des créatures
surgir de la forêt au loin. Aussitôt, il cria à l’enfant. Ce dernier se
retourna et remarqua les monstres. Pris de panique, il accourut vers son
père laissant tomber le seau qui se vida de son contenu qui imbiba le sol.
Ils se ruèrent alors vers le clocher en direction du village, l’endroit où
se retrouvaient toujours le roi ainsi que le prêtre à cette heure de la
journée.
Ils passèrent les palissades sans sentinelles et pénétrèrent dans le
village. Ce dernier très peu peuplé ne démontrait en rien sa grandeur et sa
richesse. De simples chaumières étaient construites sur le sol de terre. Un
seul chemin en pavé grisâtre parcourait le village entier sur lequel
circulaient des charrettes tirées par d’immenses bœufs. Quelques villageois
se promenaient nonchalamment se laissant guider par leur accoutumance
quotidienne. Certains furent cependant distraits par la course d’un homme et
d’un jeune garçon qui se dirigeaient plus profondément dans le village.
Arrivé devant la porte en chêne du clocher, son fils à ses côtés essoufflé
par la course, l’homme la poussa durement et pénétra à l’intérieur en
vitesse. Quatre personnes étaient réunies dans la petite pièce tout près de
l’escalier menant aux cloches, discutant assis autour d’une table. Deux
grands chandeliers étaient plantés de chaque côté de celle-ci. Les hommes
bavardaient calmement lorsqu’un paysan entra en trombe dans le clocher. L’un
d’entre eux, vêtu d’une longue toge noire et le visage couvert de
vieillesse, se retourna vers l’homme ne cachant point sa surprise. Les
autres portaient tous des vêtements d’étoffes simples et à la fois utiles,
et avaient tous un ceinturon garni d’une épée et d’une dague. L’homme
s’approcha à souffle coupé, en compagnie de son fils.
— Des monstres, lâcha-t-il entre deux souffles. Des créatures se dirigent
vers notre village. Nous les avons vues…
Affaibli par l’âge et son lourd fardeau de père, l’homme se plia sur
lui-même, pris d’une grande douleur à la poitrine qui l’empêcha de continuer
d’expliquer sa découverte. Son fils s’approcha de lui, le regard inquiet. Il
caressa le large dos de son héros. Ce dernier lui rendit un sourire et lui
indiqua qu’il allait bien. Il reprit ses esprits, se retourna et se releva
afin de bien voir les autres occupants.
Un homme très costaud se leva d’un trait, main au pommeau de son épée.
— Nous devons alerter les chevaliers, répondit-il.
Ce dernier, aux cheveux longs blonds et aux yeux bruns, n’était guère très
âgé, la jeunesse de sa volonté et de son courage paraissait dans ses actes
et ses paroles.
Un autre homme, plus âgé, aux cheveux et aux yeux noirs se leva à son tour.
— Où avez-vous croisé leur regard ? demanda-t-il au paysan qui reprenait peu
à peu son souffle.
— Nous étions près de notre demeure sur la colline, lorsque je les ai
aperçus au loin tout près de la forêt. Ils se dirigeaient vers nous.
— Combien étaient-ils ? demanda l’homme aux cheveux blonds.
— Je n’ai eu que très peu de temps, car j’ai tout de suite pensé à mon fils
et je me suis empressé de le protéger. C’est pourquoi nous sommes
immédiatement partis en direction du clocher.
— Et vous avez bien fait, ajouta l’homme aux cheveux noirs. Wilmur,
donnez-lui de votre eau. Cet homme en a un bien grand besoin.
Le jeune garçon s’approcha de la table, laissant son père derrière lui. Ce
dernier le regarda s’avancer et voulut l’en empêcher, mais son interlocuteur
lui fit un signe de la main, lui ordonnant de ne rien faire. Pendant ce
temps, l’homme à l’épée offrit son verre au paysan qui le remercia de sa
générosité.
— J’ai pu voir leur nombre, dit le garçon, baissant le regard vers le sol.
— N’aie crainte, jeune homme, me regarder dans les yeux ne t’apportera
aucune souffrance, crois-moi, expliqua l’homme. Maintenant, peux-tu me dire
à combien s’élevait ce nombre ?
Le jeune enfant leva les yeux vers lui.
— Il y en avait plus d’une cinquantaine, répondit-il.
Sur ces mots, l’homme qui n’avait pas pris la parole depuis le début, se
leva aussitôt. Celui-ci était plus costaud que les trois autres et ses longs
cheveux bruns se déposaient sur ses larges épaules.
— Qu’attendons-nous ô roi Doméron ? Nous devons alerter la garde royale.
— Il en sera ainsi, approuva le roi. Wilmur, dit-il en se retournant vers
l’homme aux cheveux blonds, dirigez-vous vers le palais et alertez les
soldats. Le prêtre et moi irons sommer les gens de se barricader dans leur
demeure.
— Mais nous ne savons pas qui sont ces créatures, rajouta l’homme qui venait
tout juste de parler. Il se peut que ce soit ces monstres de l’enfer dont
tant de villages racontent leur histoire.
— Écoutez-moi, soldat Xarlan, nous ne pouvons savoir si ces créatures de
l’enfer existent vraiment. Plusieurs histoires sont racontées à leur sujet,
mais aucune n’a été vérifiée. Nous nous défendrons donc comme à
l'accoutumée. Wilmur, je veux des soldats aux quatre coins des palissades.
Celles-ci arriveront dans quelques heures et nous devons être prêts à les
repousser. Exécution… et que les Dieux nous protègent, dit-il en regardant
le prêtre.
Il s’approcha du jeune homme et s’agenouilla à sa hauteur. Il plaça ses
mains sur chacune de ses épaules.
— Tu as été très brave, jeune homme, le complimenta le roi. Maintenant, toi
et ton père allez retourner dans votre demeure afin de vous barricader.
— Nous habitons sur la colline, maugréa le père agité. Ce sera le premier
endroit où ces créatures passeront avant de se rendre au village. Nous ne
pouvons y retourner.
— Qu’il vienne se battre, rétorqua Xarlan, en se dirigeant vers la porte.
— Venez tous les deux avec nous, répondit le monarque en détournant le
regard de son chevalier intrépide. Nous vous réfugierons dans ma demeure.
L’homme le remercia et somma son fils de revenir à ses côtés. Puis, tout le
monde quitta le clocher et se dirigea à leur endroit respectif, le cœur
battant à maintes répétitions.
…
Wilmur et Xarlan arrivèrent dans un grand bâtiment en bois. Ce dernier
démontrait bien sa solidité et sa grandeur renfermait son pesant d’or. Les
deux chevaliers poussèrent alors les doubles portes et pénétrèrent à
l’intérieur.
Le sol était à la fois sablonneux et terreux. Aucun toit ne protégeait
l’endroit. Le soleil surplombait le bâtiment et éclairait son intérieur.
Plusieurs enclos avec, dans certains, des chevaux noirs ou bruns
constituaient une grande partie de la construction. Près d’une centaine
d’hommes s’affairaient soit à s’entraîner, en combattant, ou en chevauchant
sur les bêtes, ou bien soit tout simplement à jacasser et à discuter de
sujets différents. Cependant, lorsqu’ils virent les deux chevaliers pénétrer
dans le bâtiment en vitesse, ils arrêtèrent tous de parler et les
regardèrent. Wilmur avança parmi les hommes, lançant de gauche à droite ces
paroles :
— Vous devez immédiatement enfiler votre armure. Nous serons bientôt
attaqués. Soyez prêts ! Je reviendrai vous chercher dans quelques minutes et
nous nous dirigerons vers les palissades. Xarlan choisira certains d’entre
vous qui resterez dans le village afin de défendre les paysans si jamais nos
envahisseurs réussissaient à pénétrer nos murailles. C’est un ordre du roi !
Exécution.
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