EXTRAIT
Une vraie p'tite mine d'or, roman
policier, Denis Cyr,
Fondation
littéraire Fleur de Lys
La meuf du 1111 Place Garon
Habituellement, elle l’accueillait comme le Messie. Mais ce jour-là,
personne ne répondait à la porte. Alors, inquiète et intriguée l’aide à
domicile, Jeanne Pinard appela tout de suite la police.
Peu de temps après, le lieutenant-détective, Julie Verne de la police
provinciale débarqua avec deux stagiaires au 1111 Place Garon. Le vieux
concierge au regard malicieux, le dénommé Quentin Constantin de l’immeuble
Fortin les accueillirent en mémérant sur le dos de la locataire de
l’appartement # 8.
Tout en parlant presque tout seul, Quentin continua inconsciemment la
lessive du plancher, du corridor principal. Forcé d’une sévère manière, le
cancanier arrêta finalement sa tâche à l’ordonnance du détective. Bien
malgré lui, il prit son trousseau de clés et ouvrit la porte d’une main.
Néanmoins, quelques secondes plus tard, il repartit sur son charabia, en se
lamentant sur un autre propos. Toujours selon ses dires, il travaillait
comme un damné, 24 heures sur 24. Son boulot était de plus en plus ingrat.
Qu’il était sous-payé !
Je vous assure que le cancanier ferma sa putain de gueule. En tout cas, pour
le moment. Quand il vit la triste scène !
Dans ses décors indigents bâtissant son univers. Lucie Chabot était bien là,
mais morte. La corpulente femme de quarante-cinq ans avait été ligotée avec
du fil barbelé. Ses poignets étaient pitoyablement déchirés. Sa bouche
scellée avec du ruban adhésif en toile. Selon les apparences, elle était
décédée de ses seules blessures, après s’être trop longuement débattu. En
juger, à première vue, il n’y avait ni vol et ni traces d’effractions.
Le seul indice trouvé sur les lieux du crime, une paire de boucle d’oreille
très chic dans une des petites poches de son veston kaki.
— Cependant quelques vérifications d’ADN et d’empreintes s’imposent, précisa
la coquette Julie. Par ailleurs, Julie Verne était surnommée avec raison la
Sœur Fidelma par ses collègues masculins. C’est vrai, que sa bouille
ressemblait comme deux gouttes d’eau à l’héroïne de l’écrivain Peter
Tremayre, mais démultiplions toute de suite sa notoriété, qui n’arrivait
même pas à la cheville de celle de la religieuse et juriste irlandaise.
Néanmoins, suite à l’enquête préliminaire, l’autorité policière régionale
découvrit la réelle identité de la meuf de cette lamentable mouise. Elle
avait eu cinq enfants et tous avaient été placés par la Protection de
l’enfance, dès leurs bas âge jusqu'à leur maturité. Ainsi, Patricia 27,
Nicolas 26, Benoit 25, Jessica 23 et Edgar 20 ans avaient tous passés une
grande partie de leur vie, dans des familles d’accueils.
Cette belle progéniture provenait également de cinq pères différents. Pierre
Mongrain, un travailleur au noir de la construction vivant presque tout le
temps d’aide social. Antoine Lebon, un militant écologiste reconnu pour ses
affiliations avec le mouvement de la Blanche. Benjamin Pitre, hier galapiat
aujourd’hui délateur. Stanilas Cooper, porté disparu depuis plusieurs mois.
Finalement, Victor Huard, pensionnaire depuis fort longtemps dans un centre
; présentement en thérapie comportementale touchant la drogue.
De plus, Lucie la boiteuse était connue de ses proches voisins comme étant
une femme acariâtre et jalouse. Menteuse, calculatrice et manipulatrice aux
yeux de sa famille immédiate et selon l’avis de son psy, elle était une
malade avec des troubles émotifs et mentaux.
Voilà pratiquement un mois que la période des échanges de la LNH était
terminée. Elle s’était bouclée le 15 février plus exactement. Or, on avait
retrouvé le corps Lucie Chabot durant cette même journée.
En généralisant un peu, des rumeurs venant de l’intérieur même du poste de
police de Mont d’Or disaient : que le grand chef ne misait plus trop sur sa
nièce Julie Verne !
Qu’il aimerait bien l’échanger, faute d’effort ! Les langues sales allaient
jusqu'à prétendre : qu’aucun corps policier en voulait vraiment !
Donc, l’atmosphère était lourdement pesante, du gymnase jusque dans la
cafétéria de la police locale. Enfin, en ce 15 mars 2010, un duel verbal
semblait se dessiner entre l’agent Yvan Sanche et le lieutenant-détective
Julie Verne.
— Tiens, tiens ! Si ce n’est pas Sœur Fidelma la potiche de notre directeur
de police.
— Hey ! Le Grand slaque ! Surtout ne me dis pas que cette étrange affaire
ressemble à une autre de tes nombreuses enquêtes. Je ne te croirais même
pas. De plus mon grand slaque. je tiens à te préciser ceci; Que je suis mon
chemin, sans me soucier de l’aide de mon oncle.
— À ta place, j’en profiterais pour suivre ses traces, ton mononcle Henry a
eu une carrière exceptionnelle.
— S’il te plait Sanche, si on en restait-là.
— Qu’importe Julie, qu’est-ce que tu pense de moi, si un jour tu as besoin
d’aide. N’hésite pas à me faire signe.
— C’est dans la mesure du possible, mon grand slaque !
— En passant Julie, j’ai la chance d’avoir des billets de faveurs pour le
show d’Éric Lapointe, il est en ville ce soir.
— J’aurais bien besoin d’une pause. Cela me changerait les idées. Mais je
dois décliner ton offre mon cher Yvan.
— C’est ton choix. Mais tu ne sais pas ce que tu manques. Je parle du show,
évidemment !
— Ah ! Vous deux. Toujours en train de vous chamailler.
Un homme venait tout juste de rentrer dans la pièce, curieusement il
s’appelait Henry Verne, sans le s à la fin de son nom, comme le célèbre romancier
belge. Et pour ceux qui ne le savent pas encore, Henry Vernes était le
créateur du justicier personnage, Bob Morane. Mais en réalité, pour M.
Vernes avec un s, c’était son pseudonyme. En fait, son vrai nom était
Charles-Henri Dewisme.
En tout cas, Henry Verne, le successeur d’André De Chevigny, le veinard
justicier de mon premier essai littéraire ne semblait pas content du tout.
Et ce jour-là, il fallait que sa nièce le sache.
Sans liens entre eux, Henry et Julie s’enfermèrent à double tour dans la
salle de conférence. Pour n’en ressortir, qu’une heure plus tard. Comme le
capitaine Smith, Henry Verne possédait un don précieux, pour diriger ses
navires. Celui de mettre en confiance les gens autour de lui. Peut importe,
si les choses se gâtent, le bedonnant directeur n’abandonnerait sûrement
jamais son poste à la barre de son Titanic.
Par contre, si j’ose le comparer à Edward Smith du RMS Titanic, la plupart
des employés travaillant sous sa direction avaient une autre comparaison de
lui. D’après eux, il n’était rien d’autre qu’un violoneux. Qu’il avait l’art
de jouer du violon même quand son bateau prenait l’eau ! Qui a tord ? Qui a
raison ? Eux ou moi ? Mais disons que la principale intéressée, soit la
fille de sa soeur le trouvait un peu trop ferme, littéralement impitoyable
et carrément intraitable avec elle.
Pour tout vous dire, au début de la conversation avec sa nièce, il lui
relatait ses forces, ses faiblesses et son énorme potentiel. Cependant, vers
la fin de leur causerie, Henry lui avait assigné un assistant pour terminer
son enquête.
Pour le moment, Julie n’était pas en mesure de tout comprendre, ce qui lui
sautait en pleine face. Donc, avec une grande humilité, dans l’heure
suivante, Julie travailla en étroite collaboration avec ce boute-en-train
farceur au possible, le soi-disant Yvan Sanche. Mais en réalité, elle s’en
foutait en fait, le caractère de Julie étant comme cela. Une autre fois de
plus au lieu de tout lâcher, la jeune femme était prête à tourner la page,
malgré tout le mal qu’elle subissait de ses collègues masculins.
Durant une semaine, de l'aube à la brunante, les deux policiers ne
s’accordèrent pas une minute de répit, pour tenter d’élucider l’affaire
Lucie Chabot. Ils interrogèrent les neufs principaux suspects. De même, que
la boule de Madame Chatou. La célèbre voyante aveugle du quartier de la
vieille tour, soit l’arrondissement des défavorisés et le plus sale de Mont
d’Or. En conclusion, tous ses enfants et ses ex-amants avaient de bons
motifs de lui en vouloir, mais pas au point de la ligoté et la faire
souffrir.
— J’ai le pressentiment Yvan. Qu’il y en a un ou une dans ce clan de
délabré, qui nous ment, qui nous bluffe et nous manipule.
— Mais comment le savoir. D’après toi, julie, c’est le ou laquelle la mieux
ou le ou la pire, dans cette marmaille d’enfants. Patricia est une junkie
prostitué. En plus d’être une super consommatrice de belles grosses
factures. Son chum Angelo et elle, ont déclaré faillite deux fois en huit
ans. Nicola est un détaillant de petites pilules illégales. Jessica est
toujours sous tutelle de l’état malgré ses vingt ans. Fait à noter, depuis
peu, elle fraye dans les eaux troubles avec le dénommé Christian Marcotte,
le chef de la Coterie de la révélation.
— En passant Yvan, tu as oublié Benoit ?
— Julie, que dire de lui ? C’est un homme exemplaire qui ira loin dans la
vie.
— Même s’il est greffier au sein du tribunal de notre ville, d’après moi, ça
ne le rend pas blanc comme neige pour autant. Pas plus pour Edgar, le
trisomique 21 qui se promène tout le temps avec son nounours de peluche.
— Quand même Julie ! Sois objectif et redescend sur terre.
— Quelque part, tu as raison Yvan. Et toujours, pas de nouvelle de Cooper,
malgré une notice jaune Interpol.
— Je te ferais remarquer Julie que Stanilas souffre du syndrome de Down.
Quoi que plus léger que son fils Edgar, lui aussi n’a pas le choix d’avaler
des médicaments à vie.
— C’est une piste, que j’ai déjà vérifié mon cher Yvan ! Juste au pays, il y
a environ 1640 pharmacies.
— Il doit être inscrit sous un régime public d’assurance médicaments ou
d’assurance maladie gouvernementale. Qu’on demeure aux States, en France ou
ailleurs. On a besoin d’une ordonnance d’un professionnel de la santé.
— Yvan, je vois bien où tu veux en venir. Et comme tu le dis souvent ! Ce ne
sera pas facile. Mais pourquoi ne pas essayer. Comme on ne peut faire mieux
pour l’instant.
— Il nous reste l’identification à l’ADN de la paire de boucle d’oreille
retrouvée le jour du crime.
— C’est déjà tout fait Yvan, ce bijou Coco Chanel appartenait à madame
Alicia Bourque. Je n’en sais pas plus pour le moment.
— Bon travail Julie, c’est quand même, une très bonne piste à explorer.
— Je n’ai pas ça à faire, donc, je te confie le boulot d’en découvrir un peu
plus. On se revoit demain mon grand. Disons, pour être plus précis, j’ai ma
journée dans le corps.
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